Vers les collines – ce lointain
Veiné de brume et de mémoire –
Laissant l'empire du regard recouvrir les bois assombris
De mélancolie millénaire,
S'infléchir vers l'ample berceau
D'une vallée que jonchent de grands charmes,
Ou franchir un massif ennobli de pins noirs
Et liseré de chaumes,
Je me pose sur la vieillesse inoubliée de l’horizon,
Attentif au terroir intérieur où monte
La nuit tranquille, accompagnée
De mes songes, vieil homme à sa fenêtre d’angle.
Un parfum de vestige et de sourd renouveau
S’élève d’un humus sans âge …
Dans le jour oblique poudroient les siècles de mon souvenir.
Le crépuscule usurpe mes frontières …
Dans le viril recueillement
De l’âme lige du silence,
Enveloppée d’obscures frondaisons
Accordant leur calme sévère
A ma sombre sérénité,
Mon envergure se replie avant que l’ombre
Ne dissipe mes yeux
Familiers de l’Histoire.
Ici, dans l’amitié
Hautaine des grands arbres
Qui veillent les vieux murs
Ou d’ombrages les frôlent,
J’envisage, investi
Par le soir, la mort sourcilleuse
Où sombrent les hauteurs : face d’énigme floue
Aux orbites rongées d’abîme et de mansuétude …
Extrait de « Procession du prince »
2002